ouis XIV a sa vie durant cherché à créer un art français, et il a mobilisé tous les artistes à aller dans cette direction. Le florentin Giovanni Battista Lulli devient le français Jean-Baptiste Lully, grand ordonnateur de la musique du roi. Cependant, l’Italie continuait de rayonner dans tous les arts. En musique, Arcangelo Corelli a été le plus influent des compositeurs italiens en dépit d’une œuvre modeste (au regard des Bach, Telemann, Vivaldi, Haydn), et on retrouve son influence chez plusieurs compositeurs français de la fin du XVIIe et du XVIIIe. C’est dans les années 1690 que le jeune Couperin s’essaye au style italien, et à la sonate à la façon de Corelli. Il compose trois sonates (la Pucelle, l’Astrée, et la Visionnaire) qui vont former le matériau dont sera extrait son œuvre « les Nations » publiée en 1726.
Facétieux, François Couperin signa ses premières trois sonates de jeunesse sous un nom d’emprunt sonnant italien (Pecorini ?) pour voir quel serait leur accueil parmi les spectateurs parisiens. Satisfait de cet acceuil, il semble ne plus avoir joué d’un tel subterfuge. Les trois sonates initiales sont complétées d’une quatrième, dont le titre initial semble avoir été la convalescente. Elles donneront dans l’ordre : la Française, la Piémontaise, l’Espagnole et l’Impériale (comprendre l’Allemande), et chaque sonate (qualifiée de « sonade » par Couperin) complétée de danses françaises (des « suites »). Un mariage des goûts français et italien que l’on retrouve dans les goûts réunis (1724).
Initialement prévus pour des dessus de viole, une basse d’archet et basse chiffrée, et deux clavecins, les quatre concerts peuvent être interprétés avec d’autres instruments, comme Couperin le notait lui-même. Le duo Dacappo de deux jeunes clavecinistes italiens Luigi Accardo et Enrico Bissolo fait le pari (réussi) d’une interprétation avec les deux seuls clavecins. La comparaison avec une interprétation classique (comme celle de Reinhard Göbel) montre que la réduction à deux clavecins n’enlève rien au tonus de l’œuvre.
Le disque fait la part belle à d’autres œuvres virtuoses de Mozart et Weber. Une belle réussite.
Référence
Daccapo (Luigi Accardo et Enrico Bissolo) : Couperin, les Nations, Stradivarius, 2018.